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08 février 2023

Jason Joly - jjoly@medialo.ca

Quand l’expression de ses sentiments rime avec guérison

Prévention du suicide

Témoignages

©Photo gracieuseté - L'Express Montcalm

Martin Plouffe et Francine Desrochers ont tous les deux été touchés par le suicide et ont accepté de raconter leur expérience durant la Semaine de prévention du suicide.

En cette Semaine de prévention du suicide, L’Action a pu s’entretenir avec deux personnes qui ont été touchées par le suicide, l’une en ayant eu des pensées sombres et l’autre en ayant perdu des proches par suicide. Apportant maintenant leur soutien aux membres du Centre de prévention du suicide de Lanaudière (CPSL), elles ont accepté de raconter leur histoire et de revenir sur les obstacles qu’elles ont dû franchir tout au long de leur parcours.

Ayant eux-mêmes été confrontés au suicide dans leur vie, Martin Plouffe et Francine Desrochers sont maintenant tous deux impliqués au sein du CPSL.

M. Plouffe est un ancien militaire qui a participé à plusieurs missions en Bosnie. Il raconte que c’est non seulement ce qu’il a vu et fait, mais aussi « ce qu’il aurait pu faire » durant la guerre qui lui ont laissé de vifs traumatismes. À son retour de mission en 2006, M. Plouffe se rappelle avoir fréquemment eu des pensées suicidaires. Selon lui, c’était chose courante de la part de ses camarades de front. Formés sous une discipline ferme, les soldats ont développé un réflexe de parler le moins possible de leurs émotions et de leur détresse. « J’ai été ébranlé par le manque de soutien à mon retour. À l’époque, nous n’avions pas un bon support des anciens combattants, nous étions laissés à nous-mêmes », remarque l’ex-militaire.

Il a aussi commencé à avoir des cauchemars de guerre, mais, croyant cela normal, il a laissé aller les choses : « J’ai voulu gérer cela moi-même pour ne pas montrer mon côté vulnérable, mais ça s’est dégradé et j’ai commencé à m’isoler ». Cependant, c’est lorsqu’il a été muté en Ontario qu’il a vécu ses moments les plus sombres. Il a été contraint de se rendre à l’hôpital militaire pour y rencontrer un psychologue. Il se souvient avoir monté ce que les soldats appelaient communément « les escaliers de la honte », ceux qui menaient au département de la santé mentale. M. Plouffe a donc eu plusieurs séances individuelles avec un médecin et ensuite, des discussions en groupe avec d’autres militaires. Ces expériences ont été bénéfiques et lui ont permis de se sentir moins seul : « Nous nous sommes aperçus rapidement que nous étions tous dans le même bateau. Nous avions tous les mêmes symptômes et tous des idées noires », indique-t-il.

Perdre deux êtres chers

Pour sa part, Francine Desrochers a perdu deux personnes par suicide. La première a été son ex-mari, avec qui elle a eu deux enfants. Le couple s’était séparé et, quelques années plus tard, le 30 janvier 2002, l’homme s’est enlevé la vie. Cette perte a été très difficile pour la famille, particulièrement pour les enfants de Mme Desrochers, dont son fils Alexandre. Ce dernier est devenu policier, le travail dont il rêvait depuis qu’il était tout jeune selon sa mère. Mais sans que ses proches ne le sachent, Alexandre a vécu beaucoup de stress au travail qui l’a entrainé dans un épuisement professionnel. Mme Desrochers explique que son fils était depuis toujours très anxieux et souvent déprimé : « Quand tu n’as pas toi-même le mal de vivre, tu ne comprends pas. » Le 19 septembre 2010, Alexandre a mis fin à ses jours, victime de ce que Francine Desrochers appelle un « cancer de l’âme ».

Cet événement a été un véritable choc pour elle. « Il y a des périodes où j’ai voulu mourir, parce que ce n’est pas normal de perdre son enfant », dévoile-t-elle. Mme Desrochers a été approchée par le CPSL, qui lui a offert du soutien, ce qu’elle a tout de suite accepté. Elle a participé à des rencontres avec une intervenante seule avant de prendre part à 12 séances de groupe par la suite. Ces discussions lui ont permis de rencontrer des personnes qui vivaient la même douleur qu’elle. « Nous avons créé un lien parce que nous nous sommes rendu compte que nous ne sommes pas seuls », déclare la mère endeuillée. Lors de ces groupes, Francine Desrochers a aussi fait la connaissance d’une dame qui coanimait les séances, une femme qui avait elle aussi perdu son enfant par suicide sept ans avant. « Je me suis dit : cette dame a vécu notre souffrance et elle est encore vivante », se rappelle Mme Desrochers, qui a été inspirée de faire comme elle.

Aider son prochain dans sa douleur

Tous deux ont décidé de partager leur expérience avec d’autres personnes endeuillées ou qui ont des pensées suicidaires. Martin Plouffe a mis fin à sa carrière militaire et se réhabilite à la vie civile à Joliette. Ainsi, il consacre un peu de son temps à aider bénévolement au sein du Centre de prévention du suicide de Lanaudière. Il a accepté de participer à la Chaine de gars du CPSL, une série de vidéos sur Youtube qui propose des témoignages de personnes touchées par le suicide. M. Plouffe présente aussi des conférences pour partager son histoire : « J’ai compris, avec le temps, que nous avons chacun nos combats. Le mien n’est pas pire qu’un autre, mais il m’appartient et j’ai appris à l’assumer. »

Francine Desrochers a aussi décidé de s’impliquer et coanime maintenant des groupes pour les personnes endeuillées par suicide. « Je veux leur donner un peu d’espoir et leur dire qu’elles peuvent continuer de vivre », mentionne-t-elle. Même si certains témoignages et discussions lui rappellent des souvenirs de son propre deuil, ces séances lui montrent surtout le cheminement qu’elle a parcouru pour surmonter sa peine.

La mère endeuillée remarque que la majorité de la guérison passe par l’expression de ses émotions : « C’est important d’en parler et de ne pas garder tout en dedans ». Une affirmation que partage Martin Plouffe qui insiste sur l’importance de consulter avant que les pensées sombres ne deviennent trop envahissantes. « Il ne faut pas choisir une action irréversible pour tenter de régler une situation temporaire », conseille-t-il en terminant.

Ressources disponibles

Si vous rencontrez des difficultés, vivez un deuil par suicide ou êtes inquiets pour un proche, des ressources sont là pour vous soutenir.

Pour trouver un centre de prévention du suicide partout en région : www.preventionsuicide.ca.

Pour parler ou clavarder avec un intervenant 24/7, composez le 1 866 APPELLE (277-3553) ou visitez le www.suicide.ca.

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